Le Chant des chants

ou

Le Cantique des cantiques à trois voix !

Une formidable histoire d'amour en quatre saisons


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Auteur : Andrée Senebier

Illustration: Esther D.


« Ne réveillez pas l'amour avant qu'elle ne le veuille »

Cantique des cantiques



Prologue

Il faut bien le constater, on s'arrête rarement sur « Le Cantique des Cantiques », ce texte tiré de la Bible.

Ses descriptions de la morphologie du corps humain et les comparaisons font partie de la poésie sémitique qui donne au corps la même importance qu'à l'âme et à l'esprit. La culture grecque de nos civilisations occidentales ne nous présente que le corps et l'âme. La foi chrétienne s'appuie aussi sur ces 3 dimensions.

L’apôtre Paul ne dit-il pas

Car la parole de Dieu est vivante et efficace, plus tranchante qu'une épée quelconque à deux tranchants, pénétrante jusqu'à partager âme et esprit, jointures et moelles; elle juge les sentiments et les pensées du cœur. Hébreux 4:12

Ce texte est pourtant un trésor inestimable qui indique le cheminement que le Père désire voir suivre par chacun de ses enfants, cheminement avec son Fils Jésus qui par son humanité, est le seul accès à Dieu.

« Jésus lui dit: Je suis le chemin, la vérité, et la vie... Nul ne vient au Père que par moi. » Jean 14:6

Les commentaires, les découpages, les interprétations du texte sont très différents. J'ai choisi « La cantate de l'Amour » d'Arminjon (18e siècle) pour essayer de vous partager la richesse de ce livre qui, en ce début du 21e siècle, prend un sens particulier : la préparation de l'épouse.

C'est donc au fil des saisons que nous allons suivre la naissance et la progression de ce merveilleux amour, presque un conte de fée entre une bergère et son roi. A chaque étape nous nous arrêterons sur quelques détails, puis nous en verrons la portée sur le plan spirituel dans la vie du chrétien. Nous écouterons donc ces trois voix.

Celle de la conteuse qui présente l'histoire écrite dans ce long poème.

Celle de l'enseignant qui explique le contexte, faisant appel aux coutumes de l'époque, relevant certains détails qui échappent souvent.

Celle du journaliste qui observe en essayant d'être objectif, ce qu'est l'église de notre XXIème siècle et essaie de comprendre son évolution possible.

Les quatre saisons

La fin de l'hiver (1:1-2:7)

A l'ombre d'un olivier, sur une colline de Jérusalem, une jeune fille est assise avec ses camarades. Comme toutes celles de son âge, elle rêve à son futur amour. Elle leur parle d'un certain berger dont toutes les jeunes filles sont éprises (en sont fans!) ; elle l'a vu et reste profondément troublée par ce parfum qui émane de sa personne. Elle veut le suivre, qu'il l’entraîne à sa suite, courir avec lui. Impressionnées par ses paroles, ses amies chantent pour fêter cet amour naissant «Réjouissons-nous, soyons dans l'allégresse à ton sujet! Célébrons ton amour plus exaltant que le bon vin!

C'est bien avec raison qu'on est épris de toi.» Alors elle leur ouvre son cœur «Je suis noire, mais je suis belle, filles de Jérusalem, ... Ne prenez pas garde à mon teint noir: C'est le soleil qui m'a brûlée. Les fils de ma mère se sont irrités contre moi.. » Mais voilà, ce fameux berger passe par là. Sans honte, elle l’interpelle - « O toi que mon cœur aime, dis-moi où tu fais paître ton troupeau de brebis, où tu feras la halte à l'heure de midi, pour que je ne sois pas comme une femme errante, rôdant près des troupeaux que tes compagnons gardent.» -«Si tu ne le sais pas, ô toi, la plus belle des femmes, va donc suivre les traces du troupeau de brebis, fais paître tes chevrettes près des huttes des pâtres.» C'est ainsi que commence cette belle histoire d'amour. Il sent si bon ce Bien-Aimé, et lui, lui trouve les yeux si doux comme ceux d'une colombe ( cependant il changera ses bijoux de pacotilles en perles d'or et de diamants… il la conduira dans une maison solide où régnera le repos et la paix!) Un vrai dialogue d'amoureux ! - Je ne suis qu'une petite violette du printemps, dit-elle. - Comment! Un lys parmi les ronces, voilà ce que tu es en comparaison des autres filles. - Si je suis un lys, toi, tu es un solide pommier à l'ombre duquel il fait si bon s'asseoir. Et voici notre petite bergère subjuguée sous un tel étendard d'amour. Comme enivrée, elle se sent faible, prête à s'évanouir. Mais de son bras gauche, il soutient sa tête et il l'enlace de son bras droit. A bout de force...elle s'endort. Les amies accourent. Chut ! Dit-il, « Ne réveillez pas l'amour avant qu'elle ne le veuille.»


En hébreu « chir ha chirim » vient du verbe chanter donc le titre peut se traduire par Chant des chants au sens profane. Il peut aussi prendre le sens sacré de psaume devenant ainsi le Cantique des cantiques.

Nous avons fait connaissance avec les personnages une jeune bergère, ses amies les filles de Jérusalem. Après avoir entendu parler d'un berger extraordinaire elle l'a vu mais souhaite un rendez-vous car son désir est grand de le connaître d'avantage ; mais en même temps elle se sent indigne de lui. Cependant elle fait le premier pas puis sur son conseil sans lâcher sa tâche de bergère elle va où elle sait le trouver. La rencontre est merveilleuse, elle est complètement bouleversée. Lui, garde son calme, la soutient et patiente.

Notons déjà les termes employés : elle l'appelle « mon bien-aimé ». Il est donc le seul aimé ; lui, la nomme « mon amie, ma belle, ma colombe ». Jamais il n'emploie ma bien-aimée. En aurait-il plusieurs ?

« Ne réveillez pas l'amour avant qu'il ne le veuille » est la traduction la plus courante. Or, en hébreu le pronom est féminin : avant qu'elle ne le veuille. Ce « elle » peut remplacer le mot amour (féminin en hébreu) mais l'amour a-t-il une volonté ? C'est tellement plus évident qu'il remplace la bergère qui, elle, a toute liberté de décider. Nous verrons plus loin que ce « elle » représente l'Epouse.


En ce qui concerne notre relation avec Jésus, le même parcours se présente. Tout d'abord, on a entendu parler de Lui, par le témoignage de quelqu'un, dans un rassemblement, par les médias, un film ou une lecture. Faut-il encore se laisser interpeller, laisser grandir ce désir d'en savoir plus, passer au-delà des réactions de la famille, des amis. Puis on devra accepter de se sentir « noir », ce sentiment d'abord confus d'être indigne, ce qui demande d'ouvrir les yeux sur ce qu'on est au plus profond de notre être, ce qui motive nos pensées, nos sentiments, nos réflexes au lieu de rejeter la faute sur les autres ou les ancêtres. Enfin il faut avoir le désir que tout ce qui est mauvais soit balayé de sa vie intérieure aussi bien qu'en apparence. Tout cela, transforme la culpabilité qui s'est installée, en repentance : – c'est l'étape de la conversion – décision personnelle et libre.

Si le cœur est sincère, la rencontre a lieu avec ce grand Dieu d'Amour qui a pris la vie du marcheur de Galilée, qui s'est comparé a un simple berger, pour se mettre à notre niveau, tout petits humains que nous sommes tous. L'apothéose est bien sûr , lorsque sa présence se manifeste par le contact de l'esprit – le Saint Esprit – avec notre esprit qu'Il vient réveiller, saisissant l'être tout entier, le rendant «malade d'amour». C'est bien ce qui est arrivé aux apôtres: les témoins de l’événement n'ont-ils pas dit:

« Ils sont pleins de vin doux. » Actes 2:13



Le printemps des fiançailles (2:8-3:5)

Quelques jours plus tard, elle est dans sa maison cousant auprès de la fenêtre en pensant à lui, bien sûr ! Tout à coup elle sursaute, prête l'oreille et se dit : « C'est la voix de mon bien-aimé! Le voici, il vient, Sautant sur les montagnes, Bondissant sur les collines. Mon bien-aimé est semblable à la gazelle Ou au faon des biches. Le voici, il est derrière notre mur, Il regarde par la fenêtre, Il regarde par le treillis. Mon bien-aimé parle et me dit: Lève-toi, mon amie, ma belle, et viens! Car voici, l'hiver est passé; La pluie a cessé, elle s'en est allée. Les fleurs paraissent sur la terre, Le temps de chanter est arrivé, Et la voix de la tourterelle se fait entendre dans nos campagnes. Le figuier embaume ses fruits, Et les vignes en fleur exhalent leur parfum. Lève-toi, mon amie, ma belle, et viens! Ma colombe, qui te tiens dans les fentes du rocher, Qui te caches dans les parois escarpées, Fais-moi voir ta figure, Fais-moi entendre ta voix; Car ta voix est douce, et ta figure est agréable. Prenez-nous les renards, Les petits renards qui ravagent les vignes; Car nos vignes sont en fleur.» Le soir elle s'endort, sa pensée vers lui : « Mon bien-aimé est à moi, et je suis à lui; Il fait paître son troupeau parmi les lis. Avant que le jour se rafraîchisse, Et que les ombres fuient, Reviens!... sois semblable, mon bien-aimé, A la gazelle ou au faon des biches, Sur les montagnes qui nous séparent.» Mais bientôt c'est un rêve angoissant : « Sur ma couche, pendant les nuits, J'ai cherché celui que mon cœur aime; Je l'ai cherché, et je ne l'ai point trouvé… Je me lèverai, et je ferai le tour de la ville, Dans les rues et sur les places; Je chercherai celui que mon cœur aime... Je l'ai cherché, et je ne l'ai point trouvé. Les gardes qui font la ronde dans la ville m'ont rencontrée: Avez-vous vu celui que mon cœur aime? A peine les avais-je passés, Que j'ai trouvé celui que mon cœur aime; Je l'ai saisi, et je ne l'ai point lâché Jusqu'à ce que je l'aie amené dans la maison de ma mère, Dans la chambre de celle qui m'a conçue. »

Peut-être faut-il expliquer aux jeunes du 21e siècle ce que sont des fiançailles, cela semble tellement dépassé et pourtant tellement important. Il est bon de rappeler que le but de l'amour est le mariage «pour le meilleur et pour le pire» et non le plaisir d'un moment. Il était donc indispensable de se connaître vraiment puisqu'il s'agissait d'engager toute sa vie. Lorsque deux jeunes désiraient se marier, on célébrait les fiançailles; repas de fête avec les deux familles où le fiancé passait une bague au doigt de la fiancée. Ils pouvaient alors et seulement, sortir seuls pour se parler sérieusement, s'écouter, se regarder vivre. Après un certain temps, ils étaient en mesure de prendre leur décision: les fiançailles pouvaient être rompues, chacun reprenant sa liberté, ou bien on pensait à préparer la noce. Ceci dit, revenons à notre histoire. Notre bergère et son berger sont fiancés, notons la retenue dans leur rapport: elle est aux aguets, tous les sens en éveil, cependant elle ne se précipite pas au devant de lui, elle attend… Lui aussi est impatient mais avec quelle délicatesse il la cherche. Ils se sont retrouvés: c'est leur première sortie. Elle est heureuse, mais encore bien intimidée, comme l'oiseau qui a peur de quitter le nid avant de prendre son envol; lui est impatient de voir son visage et d'entendre sa voix, il veut découvrir qui elle est vraiment, tout connaître de sa personne. N'y a t-il pas danger à se lancer dans l'aventure? Les renards? Tout ce qui peut mettre les bâtons dans les roues. Le soir, elle en est sûre: il est à elle et elle à lui. Mais bientôt quelle horrible pensée: si elle perdait son bien-aimé? C'est impensable! Elle fera tout pour le retrouver: affronter les dangers de la nuit – surtout pour une fille toute seule – faire face aux gardes (les chefs religieux dans la plupart des commentaires). Pour la deuxième fois notons : «ne réveillez pas l'amour avant qu'elle ne le veuille».


Où en est notre nouveau chrétien fraîchement baptisé? Il se sent de plus en plus attiré vers ce Jésus qui l'attend. Il lit tout ce qui a trait à Lui, il a toujours soif d'en savoir plus, rencontre des frères et des sœurs, recherche l'enseignement de pasteurs, de ministères. C'est un approfondissement sérieux et nécessaire de sa vie spirituelle. Le Seigneur, Lui, désire entendre sa voix, voir son regard afin qu'il se livre à Lui, mais ne s'impose pas, Il lui fait seulement comprendre son amour, l'accompagne dans la douceur du printemps et l'encourage à sortir « de la fente du rocher » c'est à dire du confort de sa vie. C'est tout beau...peut-être trop beau car voici les petits renards qui surgissent...une foule de questions l'assaille: est-il trop naïf? Que va être désormais sa vie? Où peut-il être entraîné? Des difficultés matérielles, totalement imprévues l'amènent à douter: il est bien là ce bien-aimé! Mais que fait-il? Bref! Certains s'arrêtent ici et lâchent tout; d'autres ne renient pas leur engagement mais en resteront là: une simple pratique suffira – le culte le dimanche matin, peut-être une réunion selon l'occasion ou l’intérêt, un moment de prière et de lecture de la bible quelques minutes chaque jour, de bonnes œuvres de temps à autre. Cela suffit. C'est leur liberté. D'autres s'engagent à fond, accrochés par cet extraordinaire amour; rien ne les arrêtera. L'idée de le perdre les rend fous. Ils feront tout pour garder ce bien-aimé, foncent tête baissée pour évangéliser à tout-va, de leur propre initiative. C'est alors que les manifestations du St Esprit se développent: visions, pensées prophétiques, parler en langues comme en Actes 2. Lui, garde le silence tout en manifestant son amour...Il attend le don total. Mais pour l'instant, pour le chrétien : « Il est toujours à moi puis moi à Lui ! ». Après l'éveil de l'amour par un coup de foudre ou une pensée plus raisonnée il fallait apprendre à se connaître, à sortir ensemble : c'était le temps des fiançailles.



L'été des noces (3:6-5:1)

Enfin bonheur suprême, voici le jour des noces. Selon la coutume le fiancé va en cortège chercher sa fiancée. Toute la ville se presse, comme toujours, en pareil circonstance. Mais...quelle surprise ! «Voici la litière de Salomon, et autour d'elle soixante vaillants hommes, des plus vaillants d'Israël. Tous sont armés de l'épée, sont exercés au combat; Chacun porte l'épée sur sa hanche, en vue des alarmes nocturnes. Le roi Salomon s'est fait une litière de bois du Liban. Il en a fait les colonnes d'argent, le dossier d'or, le siège de pourpre; au milieu est une broderie, œuvre d'amour Des filles de Jérusalem. Sortez, filles de Sion, regardez Le roi Salomon, avec la couronne dont sa mère l'a couronné le jour de ses fiançailles, le jour de la joie de son cœur. » Le berger attendu est en fait un roi entouré de ses soldats. Tout le long de la route, ce fiancé évoque la beauté de sa promise. Il se pâme d'avance sur ses yeux, sa chevelure, ses lèvres, bref ! tout son corps est splendeur. A son tour, l'amour lui fait perdre la tête «Tu me ravis le cœur, ma sœur, ma fiancée, tu me ravis le cœur par l'un de tes regards, par l'un des colliers de ton cou. Que de charmes dans ton amour, ma sœur, ma fiancée! Comme ton amour vaut mieux que le vin, Et combien tes parfums sont plus suaves que tous les aromates!», elle est pour lui : «miel, parfum, source, jardin». Il appelle sur elle le vent «Lève-toi, aquilon! viens, autan! Soufflez sur mon jardin, et que les parfums s'en exhalent! -Que mon bien-aimé entre dans son jardin, et qu'il mange de ses fruits excellents!». Le cortège arrive, c'est elle qui l'invite à rentrer, il prend possession de tout ce qu'elle lui a préparé «J'entre dans mon jardin, ma sœur, ma fiancée; Je cueille ma myrrhe avec mes aromates, Je mange mon rayon de miel avec mon miel, Je bois mon vin avec mon lait... -Mangez, amis, buvez, enivrez-vous d'amour!». Tous les amis sont invités à festoyer «vive les mariés» !

Ce passage est sujet à de nombreuses interprétations pour identifier ce roi. Pour nous, nous restons dans cette merveilleuse aventure d'un même amour entre nos deux personnages. C'est le moment de la grande révélation : ce berger si discret est en réalité un grand roi. La description de son palanquin, la mention du bois précieux, de l'or et de l'argent dévoilent sa richesse et le tissu de pourpre sa royauté. Avant la fiancée, ce sont les amies qui sont invitées à l'acclamer. Notons qu'elles sont appelées filles de Sion et non plus filles de Jérusalem. Avant, il s'agissait d'habitantes de la ville alors que la nouvelle appellation fait référence à la venue du Messie dont Salomon est une figure « Mais vous vous êtes approchés de la montagne de Sion, de la cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste, des myriades qui forment le chœur des anges, » Héb 12:22 et encore « Je regardai, et voici, l'agneau se tenait sur la montagne de Sion, et avec lui cent quarante-quatre mille personnes, qui avaient son nom et le nom de son Père écrits sur leurs fronts. » Apo 14:1.

La fiancée, elle, est au Liban, peut-être pour évoquer sa pureté, sa blancheur (Liban signifiant blanc). Il la voit déjà à ses côtés sur la route de Jérusalem, ses valeureux guerriers seront là pour s'occuper des fauves. Pour lui son amour s'intensifie: elle est un rayon de miel car toute douceur, jardin clos car elle lui est entièrement réservée, source d'eau car apportant la vie. Il appelle le vent du nord, l'Aquilon apportant la fraîcheur et celui du sud, l'Autan qui fait mûrir les fruits par sa chaleur. Enfin le cortège arrive. Pas de surprise, elle le connaît parfaitement – c'est dans l'intimité qu'il s'est révélé – elle a tout préparé pour lui, l'invite et donne tout : elle a réveillé l'amour. Alors lui, accepte, entre et prend possession de tout. C'est le temps de l'amour total et réciproque : c'est la noce. Deux termes s'ajoutent « ma sœur, ma fiancée ».



Nous retrouvons notre chrétien bien engagé dans la vie de l'église qu'il fréquente, où il essaie de trouver sa place. Puis un jour, que ce soit au cours d'une réunion ou plus souvent dans un moment de prière, il se sent brusquement en face de la grandeur et de la puissance de Celui qui, jusque là était son ami, son confident. Son Sauveur devient son Seigneur, son Roi. Il est saisi par son autorité. A l'amour s'ajoute alors la crainte – non pas la peur – mais un saint respect. La présence du Saint Esprit prend alors une autre dimension. On ne peut alors que tout Lui remettre; la satisfaction de combler ses désirs est plus forte que l'obéissance à des commandements. Lui, voit son épouse comme une merveilleuse créature. Qu'Il prenne toute la place pendant qu'elle diminue jusqu'à pouvoir dire avec Paul «J'ai été crucifié avec Christ; et si je vis, ce n'est plus moi qui vis, c'est Christ qui vit en moi; si je vis maintenant dans la chair, je vis dans la foi au Fils de Dieu, qui m'a aimé et qui s'est livré lui-même pour moi. » Gal 2:20. C'est alors le don total de tout son être. Tous ses désirs, tous ses rêves, tous ses projets, son passé, son présent et son avenir: tout est à Lui. Le jardin secret et ses fruits c'est le don total et sans retour qu'Il attendait pour sceller l'alliance des noces. Impossible de garder ce bonheur pour soi, il faut le partager. Comment? En faisant la fête! Alors là, l'ennemi se déchaîne et ce sont maintenant des fauves qui se précipitent: les épreuves pleuvent douloureusement. Mais le Roi veille afin que la souffrance n'ait pas le dessus. Son armée est là pour contrôler la situation et vaincre l'ennemi. Le vent du nord apportant les difficultés, celui du sud envoûtant par sa douceur sont transformés par celui de l'Esprit qui change le mal en bien.


L'orage d'été (5:2-6:3)

Le couple vit heureux, mais un jour, l'époux s'est absenté. Le soir vient, elle s'est couchée. Au milieu de la nuit, elle sursaute «J'étais endormie, mais mon cœur veillait... C'est la voix de mon bien-aimé, qui frappe: -Ouvre-moi, ma sœur, mon amie, Ma colombe, ma parfaite! Car ma tête est couverte de rosée, Mes boucles sont pleines des gouttes de la nuit. J'ai ôté ma tunique; comment la remettrais-je? J'ai lavé mes pieds; comment les salirais-je? Mon bien-aimé a passé la main par la fenêtre, Et mes entrailles se sont émues pour lui. Je me suis levée pour ouvrir à mon bien-aimé; Et de mes mains a dégoutté la myrrhe, De mes doigts, la myrrhe répandue Sur la poignée du verrou. J'ai ouvert à mon bien-aimé; Mais mon bien-aimé s'en était allé, il avait disparu. J'étais hors de moi, quand il me parlait. Je l'ai cherché, et je ne l'ai point trouvé; Je l'ai appelé, et il ne m'a point répondu. Les gardes qui font la ronde dans la ville m'ont rencontrée; Ils m'ont frappée, ils m'ont blessée; Ils m'ont enlevé mon voile, les gardes des murs.» Ses amies alertées par ses cris arrivent «Je vous en conjure, filles de Jérusalem, Si vous trouvez mon bien-aimé, Que lui direz-vous?... Que je suis malade d'amour.

- Qu'a ton bien-aimé de plus qu'un autre, O la plus belle des femmes? Qu'a ton bien-aimé de plus qu'un autre, Pour que tu nous conjures ainsi?

- Mon bien-aimé est blanc et vermeil; Il se distingue entre dix mille. Sa tête est de l'or pur; Ses boucles sont flottantes, Noires comme le corbeau. »

Elle explique alors pourquoi elle l'aime tant, s'extasie sur tout son corps et termine «Son palais n'est que douceur, Et toute sa personne est pleine de charme. Tel est mon bien-aimé, tel est mon ami, Filles de Jérusalem! Où est allé ton bien-aimé, O la plus belle des femmes? De quel côté ton bien-aimé s'est-il dirigé? Nous le chercherons avec toi. » Brusquement, elle sait où il est : c'est une certitude «Mon bien-aimé est descendu à son jardin, Au parterre d'aromates, Pour faire paître son troupeau dans les jardins, Et pour cueillir des lis. ». Il n'est pas que pour elle : elle se met à son service «Je suis à mon bien-aimé, et mon bien-aimé est à moi; Il fait paître son troupeau parmi les lis. » Elle est d'abord à lui et ensuite lui à elle.


Attardons nous sur certains détails de cet épisode conjugal. Lui, entre vraisemblablement assez tard puisque sa femme est couchée. C'est curieux: il frappe pour entrer chez lui! N'oublions pas que nous sommes au Moyen-Orient il y a environ 2500 ans ! Les femmes avaient leur tente particulière (voir Isaac qui conduit Rebecca dans la tente de sa mère). Il en sera de même pour les maisons. Admirons en quels termes il l'interpelle : ma sœur, mon amie, ma colombe – voici donc comme il la voit, aucun reproche, aucune impatience. Il insiste car il est trempé. Comme elle tarde, il va essayer d'entrer… c'est facile, il suffit de passer le doigt dans le trou de la porte et soulever une petite barre – un jeu d'enfant – mais non, sa discrétion l'en empêche et par délicatesse, pour lui faire comprendre son amour, il laisse son parfum dans le trou et sans insister, il s'en va. Quant à elle, bien sûr qu'elle l'aime, elle s'est endormie en pensant à lui… Mais voilà, la paresse l'a saisie ; quel effort de se lever ! Alors elle prend son temps. Elle sursaute en ouvrant la porte : il est parti ! Quel affolement ! Pas le temps de s'attarder en regrets, il faut le retrouver. La voici dans la rue – quel imprudence pour une femme seule, elle échappe aux gardes qui sont très menaçants voire dangereux. Sa nonchalance lui a fait perdre la protection évidente de son époux. Alors elle cherche l'aide de ses amies : celles-ci ne sont pas très compréhensives « un de perdu, dix de retrouvés » diraient-elles aujourd'hui. Et voici qu'au lieu de se justifier et de l'accuser, elle fait de lui, un si merveilleux portrait qu'elles ne peuvent que lui offrir leur aide. Mais, elle sait où il est : il est descendu dans son jardin (celui qu'elle lui avait préparé) et de là il est parti cueillir des lys dans les jardins (pluriel en hébreu) c'est à dire qu'il est allé chercher d'autres épouses !Elle comprend alors que son amour inconditionnel doit être partagé « moi je suis à mon bien-aimé et mon bien-aimé est à moi », il est toujours son bien-aimé – aucune jalousie – mais il n'est pas sa possession exclusive, elle est d'abord à lui, lui appartient et elle partage ses désirs.


Que devient notre chrétien que nous avons laissé en pleine euphorie ? Le temps passe, on s'habitue à la présence continuelle du Seigneur. Où est passé ce besoin de chanter pour Lui, voire de danser pour Lui ? On se parle de moins en moins – la prière devient un monologue, voire un disque; on est moins attentif à Ses réponses, à Ses demandes, à Ses avertissements. Peu à peu, le naturel (la chair dirait l'apôtre Paul) revient au galop. Sans même s'en apercevoir, on laisse ressurgir ses défauts ou en apparaître de nouveaux. Et surtout, ces chers raisonnements refont surface pour conduire au terrible besoin de diriger sa vie « oui Seigneur, j'ai bien compris...mais... » bref on a perdu le premier amour. Ceci jusqu'à ce qu'on se retrouve dans une situation bien difficile et dangereuse. Alors on appelle à l'aide les amis qui ne comprennent pas où est le problème, les responsables religieux (les gardes), enveniment la situation. Lorsqu'on a atteint la limite de ses forces, la voix de l’Époux se fait entendre, pleine de douceur « je suis là ». Les chutes sont inévitables. Nous en paierons les conséquences, cela est douloureux mais l’Époux n'abandonne jamais son épouse. L'épreuve a été dure mais on a franchi une étape. On a compris que le Bien-Aimé n'est pas à notre service pour bénir la bonne réussite de nos désirs. C'est aussi l'occasion de réaliser qu'Il a un grand souci, d'autres épouses à rencontrer et pour cela Il nous fait la grâce d'avoir besoin de notre collaboration « je suis à toi (en priorité) et tu es à moi (ensuite) ». Ce qui signifie qu'on ne va plus travailler POUR Lui, selon nos initiatives personnelles, si belle soit l'intention, mais AVEC Lui, c'est à dire quand Il veut et comme Il veut. Cet orage d'été a finalement été très bénéfique. Le Seigneur a fait de l'épreuve une occasion de croissance.



L'automne des fruits (6:4–8:4)

La petite fiancée est devenue femme accomplie, la plus belle des reines, rayonnante de la beauté de son royal époux. Ils dansent ensemble «Reviens, reviens, Sulamithe! Reviens, reviens, afin que nous te regardions. -Qu'avez-vous à regarder la Sulamithe Comme une danse de deux choeurs?». Ses amies ne la reconnaissent plus «Qui est celle qui apparaît comme l'aurore, Belle comme la lune, pure comme le soleil, Mais terrible comme des troupes sous leurs bannières?» .

Elle vient de s'engager librement et totalement dans la mission de son mari «Je ne sais, mais mon désir m'a rendue semblable Aux chars de mon noble peuple.»

Ils sont UN maintenant et partent ensemble - «Je suis à mon bien-aimé, Et ses désirs se portent vers moi. Viens, mon bien-aimé, sortons dans les champs, Demeurons dans les villages! Dès le matin nous irons aux vignes, Nous verrons si la vigne pousse, si la fleur s'ouvre, Si les grenadiers fleurissent. Là je te donnerai mon amour.»

Et même maintenant, elle travaille seule pour lui «Les mandragores répandent leur parfum, Et nous avons à nos portes tous les meilleurs fruits, Nouveaux et anciens: Mon bien-aimé, je les ai gardés pour toi.»



Notre petite bergère est devenue reine. Ses qualités, sa beauté, la lumière dont elle rayonne sont reconnues par tous ceux qui l'approchent. Elle provoque l'admiration mais aucune jalousie. Étonnamment cette épouse a aussi un aspect redoutable. L'allusion aux guerriers, aux chars peut poser question. Au passage notons le nom qui lui est donné ici : Sulamithe c'est vraisemblablement le féminin de Salomon ou cela peut aussi désigner les partisans de Salomon. Elle a pris le nom de son mari. Ce nom vient de shalom : la paix. Comme ce couple de danseurs est admirable et combien est touchante l'admiration de l'époux pour l'épouse. Leurs sentiments ont encore évolué. Il la désire sexuellement comme le suggèrent la description de son corps, les plantes et les fruits mentionnés. Il veut la connaître au sens hébraïque du terme. Non pas l'avoir rencontrée ou en avoir entendu parler mais la pénétrer sexuellement (Adam connu Eve). Mais ce couple ne restent pas replié sur son bonheur. C'est elle maintenant qui lui rappelle qu'il faut sortir, sans compter sa peine pour voir où en est la vigne, surveiller la maturation des fruits. Ils vivent pleinement cette devise de St Exupery « aimer, ce n'est pas se regarder l'un, l'autre, c'est regarder ensemble dans la même direction ». Notons encore ce souhait de l'épouse «Oh! Que n'es-tu mon frère, Allaité des mamelles de ma mère! Je te rencontrerais dehors, je t'embrasserais, Et l'on ne me mépriserait pas.» En public, on se sentait plus libre avec un frère qu'avec un époux.


Au fil du temps, dans les bons et mauvais jours, notre chrétien a mûri, ayant franchi les étapes de la vie, triomphé des épreuves, accroché à son Seigneur. Il a appris à maîtriser ses émotions, la vivacité de ses réactions . Son regard change, une certaine lumière filtre et peut étonner l'entourage. Les combats ne sont pas terminés mais il a appris à utiliser tous les éléments de l'armure : «Tenez donc ferme: ayez autour de la taille la vérité pour ceinture, et revêtez-vous de la droiture en guise de cuirasse. Ayez pour chaussures à vos pieds la disponibilité à servir la Bonne Nouvelle de la paix. En toute circonstance, saisissez-vous de la foi comme d'un bouclier avec lequel vous pourrez éteindre toutes les flèches enflammées du diable. Prenez le salut pour casque et l'épée de l'Esprit, c'est-à-dire la Parole de Dieu. » (Eph 6:14-17). La joie des noces est toujours là. C'est à ce moment là qu'on peut porter vraiment le nom de chrétien, dérivé de Christ comme cela s'est passé à Antioche «C'est à Antioche que, pour la première fois, les disciples de Jésus furent appelés chrétiens. » Actes 11:26. Qu'avons-nous fait de ce nom?

La communion est telle que l'épouse peut maintenant prendre l'initiative. Elle le connaît si bien ! C'est ce qui se passe dans l'intercession où conduits par l'Esprit nous Lui demandons cela même qu'Il désire « De même aussi l'Esprit nous aide dans notre faiblesse, car nous ne savons pas ce qu'il nous convient de demander dans nos prières. Mais l'Esprit lui-même intercède par des soupirs inexprimables; » Rom 8:26.

Pour le chrétien le souhait de la Sulamithe s'est réalisé puisque Jésus est vraiment son frère, Il l'a proclamé lui-même dans « Et le roi leur répondra: Je vous le dis en vérité, toutes les fois que vous avez fait ces choses à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous les avez faites. » Mat 12:5-25:40. Époux et frère ? Un jour nous comprendrons.




L'arrière saison (8:5-7)

Les années ont passé et voici les amies – toujours elles – qui s'exclament « qui donc est celle-ci qui monte du désert ? S'appuyant sur son bien-aimé ». Le couple avance tranquillement sur le chemin aride et se parle à mi-voix. C'est le moment d'échanges au sujet de leur amour qui n'a cessé de progresser : ils évoquent son intensité, sa durée, sa source, sa résistance, son prix «Mets-moi comme un sceau sur ton cœur, Comme un sceau sur ton bras; Car l'amour est fort comme la mort, La jalousie est inflexible comme le séjour des morts; Ses ardeurs sont des ardeurs de feu, Une flamme de l'Éternel. Les grandes eaux ne peuvent éteindre l'amour, Et les fleuves ne le submergeraient pas; Quand un homme offrirait tous les biens de sa maison contre l'amour, Il ne s'attirerait que le mépris. ». Enfin c'est en toute sérénité qu'ils évoquent l'inévitable séparation « Habitante des jardins! Des amis prêtent l'oreille à ta voix. Daigne me la faire entendre Fuis, mon bien-aimé! Sois semblable à la gazelle ou au faon des biches, Sur les montagnes des aromates!»


Maintenant c'est ensemble qu'ils montent du désert, ce lieu qui peut symboliser la vie avec ses oasis au milieu de l'aridité des difficultés. La traversée s'achève, elle s'appuie sur lui comme ces couples qu'on peut rencontrer la main dans la main, le plus fort soutenant le plus faible de son bras secourable. Ils se sentent inséparables comme le roi et son sceau (son cachet), cet objet attaché au cou comme un pendentif ou serti dans une bague qui servait à officialiser les ordres donnés. Comme la mort inévitable, l'amour a toujours le dernier mot. L'image des flammes en évoque l'intensité et la source en est révélée : l’Éternel. Aucune eau ne pourra en éteindre l'incendie, aucune fortune ne pourrait acheter un tel trésor. Le moment de la grande séparation approche...une seule demande : fait moi entendre ta voix et puis pars vite, toi l'éternel jeune continue ta course. Elle sait très bien qu'il a du travail à faire et que pour elle ce n'est qu'un au-revoir.


Pour le chrétien aussi arrive ce temps de désert.

- Alors que les forces faiblissent, la fragilité s'installe, c'est le moment de s'accrocher à son bras, d'accepter l'aide des frères et sœurs, se dire

- « Ne perdons pas courage. Et lors même que notre homme extérieur se détruit, notre homme intérieur se renouvelle de jour en jour. » 2 Cor 4:16. Depuis Jésus, nous savons que l'amour ne périra pas, que Dieu est la source, l'essence même de l'amour, en ce qui concerne les grandes eaux, dangers pour l'amour, Paul nous affirme en Rom 8:37-39 «Mais dans toutes ces choses nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés. Car j'ai l'assurance que ni la mort ni la vie, ni les anges ni les dominations, ni les choses présentes ni les choses à venir, ni les puissances, ni la hauteur, ni la profondeur, ni aucune autre créature ne pourra nous séparer de l'amour de Dieu manifesté en Jésus Christ notre Seigneur.» L'idée d'acheter l'amour nous ferait sourire et pourtant la motivation inconsciente de certaines prières, de bonnes actions, ne provient-elle pas d'un tel désir? Enfin, un jour arrivera le grand départ. Entendre sa voix jusqu'au bout est le désir suprême sachant qu'un jour c'est avec un corps tout neuf, tout jeune, tout beau que nous le rejoindrons sur les monts embaumés.


Réflexions

Vue d'ensemble...sur le parcours de l'amour conjugal

Dans le Cantique, nous avons suivi les étapes de leur amour : le désir réciproque l'un pour l'autre, pour elle, la crainte de ne pas être à la hauteur - le rendez-vous - les émotions de la rencontre - les premières épreuves. Puis c'est l'étape principale : le passage du « Il est à moi » à « Je suis à lui » par le don total scellé à la noce avec celui qui s'est révélé être le roi. La vie du couple s'installe avec ses accros (l'incartade de l'épouse réglée par sa détermination d'en sortir et la délicatesse de son époux). Peu à peu, elle s'identifie à lui, les deux sont devenus « un » ; puis c'est la dernière étape : les réflexions sur leur amour.

Pour le couple homme-femme il en est de même : passer de l'amour-phileo, temps où l'on se découvre par l'amitié, à l'amour-agapé où l'on veut donner du bonheur à l'autre en priorité, enfin arriver à l'amour-éros, l'amour physique et atteindre ainsi l'union absolue. Malheureusement en notre 21e siècle, l'ordre est complètement inversé dans notre civilisation soit-disant évoluée ! La satisfaction du « moi » passe en priorité, tant pis pour l'autre ; combien est rare la délicatesse, la patience, la compréhension en cas de friction, de problème, enfin le déséquilibre psychologique de nombreux humains rend la vie en couple impossible.

Qu'en est-il du parcours du chrétien avec Jésus ? Nous avons vu au départ le désir de Le connaître même si ce n' est qu'un besoin inconscient, suivi de la repentance « Car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu; » Rom 3:23 et de l'acceptation du pardon « Et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus Christ.Rom 3:24 » ce qui conduit à la conversion, un changement de vie librement consenti. Vient alors la visitation du St Esprit, expérience ineffable de la présence du Seigneur. Puis c'est l'engagement dans une église pour recevoir l'enseignement nécessaire, trouver le contact avec d'autres chrétiens, s'engager dans l'action. Enfin c'est la prise de conscience qu'il est le Roi et la soumission totale à sa volonté, recevant en retour sa joie et sa paix.

Il ne faut pas oublier que ce texte comme tous ceux de l'ancien testament, s'adresse en 1er à Israël, le peuple que Dieu s'est choisi. Avec quel amour il en a pris soin au temps de son enfance (Osée 11: 1-4). Par la tora (les 5 premiers livres de la Bible) il a reçu tout l'enseignement nécessaire. Les "prophètes" et les "écrits" ont évoqué son avenir avec Lui le meilleur des bergers. D'autre part Osée lui prédit, l'Eternel lui-même comme fiancé (Osée 2: 18-22) et pour tous l'Eternel est Roi. Alors, à la venue de Yéshouha (Jésus), la plupart des juifs attendaient un roi et ne reconnurent pas leur Messie dans cet humble homme de Nazareth, ils le rejetèrent d'emblée. C'était la fin de l'hiver. D'autres l'acceptèrent, furent ses premiers disciples et constituèrent les premières assemblées chrétiennes : ils passèrent à la saison des fiançailles. Mais au cours des siècles ils perdirent leur identité juive, absorbés par la foule des païens convertis formant l'église. Heureusement, notre époque a vu jaillir un rejeton de l'olivier. Des juifs ont reconnu leur Messie dans le Bon Berger donnant sa vie pour ses brebis. Jésus est devenu leur Sauveur et leur Seigneur. Ils ont dit "Mon Bien-Aimé est à moi" puis "Je suis à mon Bien-Aimé". Ce sont les "juifs messianiques" rejoignant la future épouse qui se prépare pour l'arrivée du Roi.

Quelques commentaires très personnels

Qu'a fait l'homme de ce merveilleux itinéraire de l'amour ? Revenons sur le printemps des fiançailles c'est à dire sur l'église de notre siècle libéré. Cette étape est indispensable-l'apôtre Paul n'a-t-il pas dit aux corinthiens :

« En réalité, frères, je n'ai pas pu m'adresser à vous comme à des hommes conduits par l'Esprit. J'ai dû vous parler comme si vous étiez des hommes livrés à eux-mêmes, comme à de petits enfants dans la foi au Christ. » I Corinthiens 3:1

La mise en pratique de la foi proclamée lors de la conversion s'apprend dans l'église pour appliquer les bases données en Actes 2:42

« Ils s'attachaient à écouter assidûment l'enseignement des apôtres, à vivre en communion les uns avec les autres, à rompre le pain et à prier ensemble. » Actes 2:42

Livré à lui-même, se contentant de l'enseignement des médias et à sa seule intelligence, il n'est pas capable de trier parmi toutes les théories souvent bien éloignées de l'enseignement de Jésus, il retient ce qui lui plaît, se focalise sur ce qui le frappe, se fiant à son raisonnement ou à ses sentiments. Dans l'église, frères et sœurs sont là pour l'entourer, les responsables l'enseigner et l'encourager. Tout en principe est fait pour qu'il grandisse et devienne adulte dans la foi. C'était ce qui était évident au début du christianisme où les païens pouvaient dire « voyez comme ils s'aiment ! ». Hélas, les siècles ont passé...L'église est devenue une série d'institutions, chacune avec sa hiérarchie, ses lois, ses rites, ses propres croyances. L'amour s'est refroidi, bien souvent réduit à quelques heures par semaine à l'intérieur d'un bâtiment d'église. Trop souvent rivalités voire jalousies fleurissent, motivées par le désir plus ou moins conscient de plaire aux responsables ; ceux-ci ont pris, souvent à leur insu, la place de Jésus (le seul chef de l'église), par obéissance à la tradition de leur institution, d'autres par soif d'autorité et même par orgueil-c'est humain. Que dire de ceux qui se sont libérés de la Bible, parole de Dieu, pour être acceptés par leurs contemporains cautionnant même des lois iniques. Et leurs ouailles les adulent et attendent tout d'eux, jusqu’à ce que, complètement épuisés, ils s'endorment dans la routine ou s'en vont. Heureusement, certains responsables ou simples fidèles restent attachés uniquement à l'enseignement du Christ. Ces déceptions provoquent chez eux un sursaut salutaire conduisant à un rapprochement très fort avec le Bien-Aimé… Jusqu'au jour où la souveraineté et l'autorité du Roi s'imposera. Hélas cela provoque très souvent une douloureuse rupture avec l'église-institution cramponnée à sa propre vision, ayant fait d'une parcelle de vérité, toute la Vérité, et la nécessité de protéger ses membres d'un éventuel danger.

Il reste encore pour ces solitaires à se débarrasser de l'esprit religieux qui a si longtemps bercé leur vie chrétienne… C'est une véritable cure de désintoxication avec une terrible sensation de manque de sécurité, d'errance. A ce moment crucial, l'époux manifestera sa présence par la voix de son Esprit, un rêve, une vision.

De la fiancée à l'épouse

Ce nouveau statut demande une consécration de tous les instants. Le monde qui nous entoure doit voir l'amour dans toutes les circonstances qu'on traverse, dans tous les milieux où l'on se trouve: dans la famille en priorité, mais aussi dans le voisinage, au travail, dans les loisirs. Plus un seul comportement qui laisserait poindre les traces de notre ancienne vie, car Christ a tout effacé, guéri le négatif de notre humanité-notre chair dirait l'apôtre- si toutefois on le lui a abandonné sans réserve. Il doit pouvoir utiliser nos propres talents pour sa gloire. Cela peut paraître bien idéaliste, voire impossible, certes par nos propres moyens, mais c'est seulement par son œuvre en nous si nous voulons bien « réveiller l'amour » ce qui demande de s'impliquer. Cela se fera au rythme de chacun, en son temps mais dans tous les cas le changement doit se voir. C'est un travail qui se fait seul, face à face avec l'époux, dans le silence de la chambre, pour régler les problèmes du passé… Puis ensuite sentir sa présence partout et à chaque instant-on est bien loin des temps programmés de prières, de lecture de la Bible et des bonnes œuvres, laissant ensuite le champ libre à notre « sale caractère ». C'est un contact permanent, sa pensée peut s'imposer à nous en tout temps, sa volonté est claire. Il vaut mieux entrer aussitôt dans son plan car, à en faire à notre tête, on risque fort de rencontrer les fauves du Liban : l'ennemi est toujours aux aguets. Bien sûr on sera gardé, mais que de souffrances inutiles !

Certains pourront craindre de perdre leur personnalité, il n'en est rien car Il respecte notre identité en la valorisant tel l'artiste sculptant une œuvre d'art dans un vieux tronc. Le but, à la saison des fruits : voir les autres comme Il les voit, les aimer comme Il les aime. Un seul moyen : laisser mourir son « moi » non par des efforts personnels mais en lui laissant prendre toute la place

« Qu'il croisse et que je diminue » Jean 3:30

Pour passer du temps des fiançailles à celui des noces, l'amour fou pour le Roi doit faire taire tous les raisonnements, l'incompréhension de beaucoup, le rejet de ceux en qui on avait mis notre confiance, la pression des institutions, la peur des menaces...Bref, faire sienne la devise de Marie Durand aux temps des persécutions « Résistez ! » en se souvenant que

« Là où est l'Esprit du Seigneur, là règne la liberté. » II Corinthiens 3:17

Cette nouvelle orientation prise, les baumes aromatiques se répandent (il y en a 7 dans le Cantique 4:13-14), ce que Paul appelle « la bonne odeur de Christ » (Phil 4:18).

De l'épouse à l’Épouse, ou de l'église à l'Eglise

Puis un jour, surprise ! Notre épouse rencontre d'autres épouses, l'Esprit ayant, sans aucun doute, posé le rendez-vous. Voici des frères et sœurs, ayant parcouru le même chemin intérieur, étant venus de nations, d'horizons, de dénominations très différents, qui ne se connaissaient pas, qui se trouvent maintenant sur la même longueur d'onde et se découvrent en parfaite communion. C'est alors une joie extraordinaire car personne ne peut vivre sa foi en solitaire : Jésus a envoyé ses disciples deux par deux.

Ces épouses sont unies par leur foi commune en Jésus leur Sauveur et Seigneur. C'est leur soumission à Lui et non les rites pratiqués pour l'honorer, qui fera leur unité. Chrétiens de toutes dénominations et juifs messianiques seront UN dans un même amour. Cette unité sera l’œuvre uniquement du St Esprit réalisant ainsi la prière de Jésus

« Qu'ils soient un comme toi et moi nous sommes un » Jean 17:23

Les épouses doivent rester en contact pour se soutenir dans les difficultés à affronter mais aussi pour confronter ce qu'elles reçoivent de l'Epoux- c'est si facile de lui attribuer ce qui n'est en réalité que le projet de nos désirs personnels. La foi ne peut se vivre qu'en communauté.

Ensemble ces épouses commencent à constituer la future Epouse, celle dont bien souvent on s'est demandé « qui est elle ? » en étudiant la parabole des invités à la noce, persuadé au fond, que ce ne pouvait être que nous, les membres de notre église. Ne serait-ce pas plutôt le petit reste demeuré fidèle dans les 7 églises (Apoc 2), unis à tous ceux que l'Esprit a déjà mis à part. Peut-être les invités, les amis seront-ils ceux qui, un jour, ont accepté Jésus pour leur Sauveur, l'Epouse étant ceux qui se sont totalement abandonnés à leur Seigneur. N'est-ce pas ce qui est sous-entendu dans le dernier verset du Cantique « Enfuis-toi vite », notre épouse languissait de voir se lever l'Epouse qu'elle savait être déjà dans le cœur de son Bien-Aimé.

L’Épouse

Quel sera le rôle de cette Épouse ? Je crois tout simplement : réaliser ce désir que Dieu exprima à Moise en Exode 19:5

« Vous serez pour moi un peuple précieux parmi tous les peuples, bien que toute la terre m'appartienne. Mais vous, vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte » Exode 19:5

Ce que les Hébreux ont refusé, l'apôtre Pierre, conduit par l'Esprit l'attribue aux chrétiens en affirmant

« Vous êtes une race élue, une communauté de rois-prêtres, une nation sainte » I Pierre 2:9

Pour l'instant que fait-elle cette Épouse ? Elle se prépare pour la noce ! (Apo 19:8). C'est dans le livre d'Esther que nous retrouvons les détails de ces préparatifs (Esther 2:12) : six mois de traitements pour sa beauté avec de l'huile de myrrhe, six mois avec des baumes aromatiques ; cette première servait à embaumer les morts (Jean 19:39) – confirmation que l'Epouse doit être bien morte à elle-même – les aromates, eux, pour le plaisir de L’Époux. Quant au tissu de lin, c'était celui réservé à tout ce qui touchait au sacré dans le temple : les voiles, les vêtements des prêtres, signe de richesse et de pureté ; de plus il est éclatant pour l’Épouse car il rayonne la lumière de l'Epoux même s'il n'est pas encore visiblement là.

Cette Épouse constituée, où sera-t-elle pendant les jours terribles de la grande tribulation, ce jugement qui va tomber sur l'humanité qui rejette son Créateur ? Je crois qu'il faut la chercher dans l'apocalypse, en restant prudent comme devant toute prophétie. Souvenons-nous : c'est au Liban que notre sunamite attendait son époux, loin de Jérusalem, hors du pays d'Israël ; notre Epouse ne serait-elle pas cette femme enceinte qui apparaît en apocalypse 12 ? Le soleil, la lune, les étoiles peuvent être les signes de sa beauté; quant à l'enfant qu'elle porte ne serait-il pas ceux qui, envoyés par L’Époux, gouverneront les nations en son nom, assurant paix et prospérité dans l'ordre et l'obéissance à ses lois. Notons aussi que le sceptre est le bâton du berger avec lequel il défend le troupeau – nous retrouvons le cantique ! Quant au dragon, tant que le roi ne sera pas là il se déchaînera.

Alors que le désarroi et la terreur envahissent la terre c'est l'arrivée du Roi

« Maintenant notre Dieu a manifesté sa puissance et instauré son règne, maintenant son Messie a pris l'autorité en main» Apocalypse 12:10

Le Roi présent, les noces de l'agneau peuvent être célébrées

« Le Seigneur tout puissant est entré dans son règne, réjouissons-nous, exaltons d’allégresse, apportons Lui notre hommage : voici,les noces de l'agneau » Apocalypse 19:6-7

Enfin lorsque toute chose sera devenue nouvelle, quand ce sera le temps du nouveau ciel et de la nouvelle terre, l’Épouse ne fera qu'un avec la nouvelle Jérusalem

En attendant la réalisation de toutes ces espérances que l'Esprit et l’Épouse disent

« Viens ! Que celui qui entend ces paroles disent viens ! Que celui qui a soif vienne. » Apocalypse 22:27

MARANATHA !


CONCLUSION


quelques questions que peuvent se poser

Tous les chrétiens :

A quelle étape en suis-je - fin de l'hiver, printemps, été, automne, arrière saison, moment de crise ? Il est urgent de passer à la suivante et même à la dernière, il faut veiller à ne pas s'endormir.

N'ai-je pas sauté une étape ? Si oui, il est indispensable d'y revenir. Toutes ont leur importance – il est si facile par exemple de « zapper » la repentance !

Suis-je fiancée ou épouse ? Il est si agréable de se complaire au printemps.

Toutes les églises :

Qui en est le chef ? Jésus ou l'institution humaine ?

Chaque membre a-t-il la possibilité de devenir adulte dans la foi ou est-il éternellement soumis aux autorités ? Autrement dit, l'église prend-elle soin « des enfants dans la foi » (nouveaux convertis) en les enseignant, les accompagne-t-elle dans leur « adolescence dans la foi » en leur apprenant à vraiment reconnaître la voix du bon berger , les libère-t-elle à l'âge « adulte dans la foi » ? Leur parole sera t-elle prise au sérieux lorsqu'ils voudront suivre le chemin où le Maître les appelle ? Pourront-ils passer de l'église à l’Église en toute liberté ?

Où sont les fruits ? Des disciples pour Jésus ou pour une dénomination, le sourire évangélique ou une réelle communion entre frères et sœurs, seule œuvre de l'Esprit et gage de son amour.

Sérieusement, qui peut se dire prêt ? (sûrement pas moi qui écris). Le Roi vient bientôt. Prenons conscience que son retour est proche. La réponse est urgente, préparons nous ! - Apo 22:12.